Danse des Sauvages
1725




"to hide art by very art"
"cacher l'art par l'art même"

 

 



 

 



 



Index
Sommaire
Site Map

 

 

Description de la danse de Deux Sauvages exécutée pour le première fois le Lundi 10 Septembre 1725 sur le Théâtre des Italiens.
Ce texte fut publié pour le première fois dans le Mercure du mois de Septembre 1725, puis dans le Parfaict Dictionnaire (1767).

Les Comédiens Italiens, avant leur départ pour Fontainebleau, donnèrent sur leur Théâtre une nouveauté des plus singulières. Deux Sauvages venus depuis peu de la Louisiane, grands & bien faits, âgés d'environ vingt-cinq ans, dansèrent trois sortes de danses, ensemble & séparément, & d'une manière à ne pas laisser douter qu'ils n'aient appris les pas & les sauts qu'ils font, très loin de Paris. Ce qu'ils prétendent figurer est sans doute fort aisé à entendre dans leur pays, mais ici rien n'est plus difficile à pénétrer : voici ce que nous en avons pu apprendre.

Le premier Danseur représentait un Chef de sa Nation, vêtu un peu plus modestement qu'on ne l'est à la Louisiane, mais en sorte que le nu du corps paraissait assez. Il avait sur la tête une espèce de couronne, pas riche, mais fort ample, ornée de plumes de différentes couleurs. L'autre n'avait rien qui le distinguât d'un simple guerrier. Le premier fit entendre à celui-ci, par sa façon de danser, & par ses attitudes cadencées, qu'il venait proposer la paix, & présenta le calumet  ou étendart à son ennemi. Ensuite, ils dansèrent ensemble la danse de la paix. La seconde danse appelée la guerre, exprime une assemblée de Sauvages, où l'on prend le parti de faire la guerre à tel ou à tel peuple, & on en voit toutes les horreurs. Ceux qui sont de ce sentiment opinent en venant se mêler à la danse. Dans la troisième le guerrier va d'abord à la découverte de l'ennemi, armé d'un arc & d'un carquois garni de flèches, pendant que l'autre assis par terre bat du tambour, ou espèce de timbale pas plus gros que la forme d'un chapeau. Après avoir découvert l'ennemi, le Sauvage revient en donner avis à son Chef. Il imite ensuite le combat, dans lequel il suppose avoir défait l'ennemi. Après quoi ils dansent ensemble la danse de la Victoire.